ChapitreI LES DIFFÉRENTS TYPES D'ÉCOULEMENTS DIPHASIQUES : CLASSIFICATION ET INTÉRÊTS
Plan 1. POSITION DU PROBLÈME 2. DOMAINES OÙ INTERVIENNENT LES ÉCOULEMENTS DIPHASIQUES 2.1. Génie nucléaire 2.2. Génie chimique 2.3. Génie pétrolier 2.4. Autres domaines3. GÉNÉRALITÉS SUR LES ÉCOULEMENTS DIPHASIQUES 3.1. Régimes d'écoulements 3.1.1. Régime à bulles 3.1.2. Régime à poches 3.1.3. Régime annulaire 3.1.4. Régime stratifié 3.2. Cartes d'écoulements 3.3. Principaux paramtres d'un écoulement diphasique 3.4. Équations de base d'un écoulement diphasique
1. POSITION DU PROBLÈME 2. DOMAINES OÙ INTERVIENNENT LES ÉCOULEMENTS DIPHASIQUES Trois principaux domaines où les procéssus industriels ont succité un développement important de recherche théorique et expérimentale sont concernés par les écoulements diphasiques gaz-liquides :
2.1. Génie nucléaire Pour prévoir le comportement des circui
ts de refroidissement des réacteurs nucléaires en fonctionnement nominal (en régime transitoire ou en évolution accidentelle), la connaissance approfondie de la thermohydraulique des écoulements diphasiques est nécessaire. Dans la plupart des cas, il s’agit de prévoir :
- la chute de pression ,
- la répartition de vapeur,
- les températures des parois.
Dans d’autres cas, il s’agit de voir :
- l’efficacité des circuits au niveau du transfert de chaleur,
- prévoir les efforts de structure (rupture par exemple) en régime stationnaire ou en évolution accidentelle.
Les écoulements diphasiques observés dans ces systèmes sont du type
Eau Vapeur d'Eau.
Deux exemples sont utilisés pour les réacteurs nucléaires :
- Réacteurs à Eau Bouillante (Boiling Water Reactors BWR)
Fig. 1 : Schéma de fonctionnement d'un Réacteur nucléaire à Eau Bouillante (BWR)
- Titre de vapeur à la sortie du réacteur est d'environ 20% (taux de vide ), - Pas de générateur de vapeur, - Pression peu élevée (), Les limites du titre volumique
x et du taux de vide
a proviennent de la stabilité de l'écoulement. D'où la nécessité d'un système de refroidissement de secours en cas de perte du fluide réfrigérant :
- Réacteurs à Eau Pressurisée (Pressurized Water Reactors PWR)
Fig. 2 : Schéma de fonctionnement d'un Réacteur nucléaire à Eau Pressurisée (PWR)
- La pression dans le réacteur est de l'ordre de 150 bars, - Pas d'ébullition dans le réacteur, ou lors d'un fonctionnement accidentel :
pas de problèmes de stabilité.
- Circuit secondaire non radioactif, - Enceinte plus petite, - Contrôle facile du réacteur.
Fig. 3 : Vue générale d'une centrale nucléaire à 2 réacteurs (Photo. EDF)
De la même manière que les centrales nucléaires, le fonctionnement d'une centrale thermique se divise en quatre étapes : un combustible est brûlé (charbon, fioul, gaz naturel et gaz hauts fourneaux) et fournit de la chaleur dans un générateur de vapeur où de l'eau est vaporisée sous pression. La vapeur est alors "détendue" dans une turbine, ce qui signifie qu'elle passe d'une haute pression initiale (165 bars) à une basse pression (50 millibars). La détente de la vapeur provoquée par cette baisse de pression permet d'entraîner la turbine et l'alternateur qui produit l'électricité. La vapeur est ensuite liquéfiée dans un condenseur puis recyclée.
Fig. 4a : Vue générale d'une centrale thermique (Photo. EDF)
Fig. 4b : Schéma de fonctionnement d'une centrale thermique
2.2. Génie chimique Augmenter les surfaces d'échange pour favoriser les réactions chimiques.
Exemple : Fig. 5 : Colonne à bulles utilisée en génie chimique
2.3. Génie pétrolier En génie pétrolier, les écoulements gaz-liquide sont fréquemment rencontrés surtout dans l'exploitation des gisements. En exploitation naturelle, le pétrole est extrait sous l'effet de la pression exercée par le gaz sur le liquide, et en exploitation assistée on injecte du gaz sous pression dans la poche du gisement.
Fig. 6 : Exploitation des gisements de pétrole (écoulements diphasiques)
2.4. Autres domaines d'application
- Pompes à chaleur,
- Machines frigorifiques,
- Pompes du type gaz lift.
Fig. 7 : Exemple de pompe du type air lift
3. GÉNÉRALITÉS SUR LES ÉCOULEMENTS DIPHASIQUES Les écoulements diphasiques peuvent être classés selon les phases en présence (liquide, solide, gaz ou plasma (gaz ionisé)) ou selon la distribution spatiale des interfaces. Pour le premier cas, les combinaisons possibles sont les suivantes :
- mélange de 2 liquides non miscibles (échangeurs à contact direct par exemple),
- mélange solide liquide (transport de boue, etc.),
- mélange gaz solide (transport de pneumatique),
- mélange gaz liquide (ébullition dans les réacteurs nucléaires).
Concernant le second cas, on distingue les écoulements suivants (schématisés par la figure ci-dessous) :
Fig. 8 : Écoulements à phase dispersée
Fig. 9 : Écoulements à phases séparées
Fig. 10 : Écoulements de transition
En écoulement diphasique gaz liquide, les calculs et les descriptions sont effectués pour une configuration donnée de l'écoulement. Ces configurations sont basées sur la description d'interface qu'on appelle "
régimes d'écoulement", et qu'on peut prévoir avec ce qu’on appelle “
des cartes d'écoulement”.
Fig. 11 : Exemples de régimes en écoulements diphasiques eau air verticaux co-courants (Roumy, 1969) :
(a) : Bulles séparées; (b) : Lit dense de bulles; (c) : Poches; (d) : Churn; (e) : Annulaire
Fig. 12 : Exemples de régimes d'écoulements diphasiques eau air en conduites horizontales (Delhaye, 1981) :
(1) : Bulles; (2) : Bulles allongées; (3) : Stratifié lisse; (4) : Stratifié ondulé; (5) : Poches; (6) : Annulaire
La figure suivante montre les configurations obtenues lors d'un écoulement liquide vapeur en conduite verticale chauffée. En effet, ces configurations dépendent essentiellement du flux de chaleur imposé au niveau de la paroi. Le liquide entre dans le tube à débit constant et à température constante (température inférieure à celle de la saturation). Quand le flux de chaleur augmente, la vapeur apparaît de plus en plus à partir du début de la conduite. Ainsi, on assiste à une transition de l'écoulement d'un régime à un autre.
Fig. 13 : Écoulement vertical de liquide à débit constant dans une conduite chauffée (Hawitt & al., 1970)
3.1. Régimes d'écoulements Lors d'un écoulement diphasique gaz liquide interne où la phase continue est le liquide, on distingue trois configurations principales (figure 1) :
Fig. 14 : Régimes d'écoulement gaz liquide (phase continue : liquide)
3.1.1. Régime à bulles La phase gazeuse de l'écoulement est répartie sous forme de bulles dispersées dans le liquide qui constitue la phase continue. Les dimensions de ces bulles sont petites en comparaison avec le diamètre de la conduite. Ce régime n'apparaît que pour de faibles vitesses superficielles de gaz. L'écoulement horizontal à bulles n'existe que pour des vitesses superficielles du liquide suffisamment élevées.
3.1.2. Régime à poches En augmentant le débit de gaz, les bulles coalescent pour donner lieu à des poches séparées par des bouchons de liquide de sections voisines de celle de la conduite.
3.1.3. Régime annulaire Le gaz circule à grande vitesse au centre de la conduite et provoque la formation d'un film liquide ondulé à la paroi.
3.1.4. Régime stratifié L'écoulement en conduite horizontale est caractérisé par un quatrième régime appelé "
régime stratifié". Ce dernier est causé principalement par la différence de masse volumique entre le gaz et le liquide à grandes vitesses, et provoquant leur séparation. En effet, cette différence densité fait que le gaz circule dans la partie haute de la conduite au-dessus du liquide. Dans le cas d'un écoulement diphasique gaz liquide co-courant descendant, Oshinowo & Charles (1974) ont distingué six différentes configurations d'écoulement comme les montre la figure ci-après.
Fig. 15 : Écoulements gaz liquide co-courants descendants en conduites verticales :
(1) : Bulles; (2) : Poches; (3) : Film tombant; (4) : Film tombant à bulles; (5) :Churn; (6) : Annulaire dispersé
3.2. Cartes d'écoulements Une carte d'écoulement, comme son nom l'indique, est une représentation graphique bidimensionnelle des domaines d'existence des différents régimes. Les systèmes de coordonnées qui la définissent sont choisis parmi les variables de l'écoulement diphasique. Ces derniers sont différents selon les auteurs, et il n'existe pas de consensus sur le meilleur système. Les paramètres qui sont souvent employés sont ceux utilisés par l'expérimentateur pour contrôler l'écoulement ; à savoir les vitesses superficielles du liquide
et du gaz
, etc. Les frontières entre les différents régimes n'ont jamais été bien définies et les zones de transition sont relativement étendues, d'où le caractère subjectif de ces cartes d'écoulement. La première carte fut celle de Baker (1954) proposée pour un écoulement horizontal.
Fig. 16 : Carte des différents régimes lors d'un écoulement horizontal (Mandhane et al., 1974)
La carte d'écoulement présentée précédemment dans la figure 11 (Mandhane et al., 1974) a été établie pour un écoulement horizontal gaz liquide en conduite cylindrique. Celle-ci utilise comme système de coordonnées les vitesses superficielles du liquide et du gaz en coordonnées logarithmiques. Les frontières de transition entre les différents régimes restent encore moins précises dans cette carte.En écoulement diphasique co-courant vertical ascendant, Mac Quillan et Whalley (1985) ont établi une carte définissant les différents régimes. Dans cette dernière, ils ont convenablement définis les frontières des différentes zones de transition. Ces frontières sont généralement représentées à partir des relations analytiques adimensionnelles ou dimensionnelles, faisant intervenir les débits et les propriétés de chaque phase ainsi que les caractéristiques de l'installation expérimentale. Ci-dessous, la figure 12 donne un exemple de carte d'écoulement établie pour définir les différentes frontières de régimes d'écoulement.
Fig. 17 : Carte des différents régimes lors d'un écoulement vertical co-courant eau air
Fig. 18 : Régimes d'écoulements en hélice (Boyce, 1969)
Fig. 19 : Régimes d'écoulements en hélice (Kozeki, 1970)
Fig. 20 : Régimes d'écoulements en hélice (Banerjee, 1969)
Fig. 21 : Régimes d'écoulements en hélice (Casper, 1970)
3.3. Principaux paramtres d'un écoulement diphasique Dans tout ce qui suit, l'indice "
l" se rapporte à la phase liquide et l'indice "
g" se rapporte à la phase gazeuse.Nous définissons les grandeurs utilisées en écoulement diphasique de la manière suivante :
- Le taux de vide ou le taux de présence de gaz moyenné dans le temps en un point M quelconque de la conduite, est :
où
T est la durée de l'observation et
est la fonction de présence de gaz définie par :
- Si le gaz occupe la surface dans la section A, alors le taux de vide global sur cette dernière est défini par la moyenne spatiale :
où
A est la section de la conduite.
- Les titres volumique (b) et massique (x) sont définis par :
où
Q et
M désignent respectivement les débits volumique et massique.
- Les vitesses débitantes du liquide et du gaz sont respectivement définies par :
- La vitesse massique totale est définie par :
- Les vitesses massiques du liquide et du gaz sont définies par :
- Si et sont respectivement les vitesses locales des phases liquide et gazeuse moyennées sur les temps de résidence et en un point M donné de la conduite, la vitesse de glissement en ce point est donnée par :
3.4. Équations de base d'un écoulement diphasique Dans l'étude des écoulements diphasiques, les équations fondamentales reposent sur les équations de bilans. Ces bilans peuvent être écrits soit de façon simplifiée (globale) soit de façon locale.
Les équations fondamentales simplifiées sont établies sous forme de deux modèles approchés dits "
modèle séparé et
modèle homogène" (Delhaye et al. (1981)).
Le modèle séparé considère que les deux phases ont des propriétés différentes et suppose que chaque phase s'écoule avec une vitesse uniforme moyennée dans la section. L'autre modèle qui est en fait un cas particulier du modèle séparé (
), traite le mélange gaz liquide comme un pseudo fluide monophasique dont les propriétés sont les moyennes du mélange obéissant aux lois d'un écoulement monophasique. Sur le plan local, les bilans traduisent les principes dits de
conservation ou d'
évolution :
- bilan de continuité (bilan de masse),
- bilan de quantité de mouvement (torseur de quantité de mouvement ou loi fondamentale de la dynamique),
- bilan de l'énergie totale (premier principe de la thermodynamique),
- évolution de l'entropie (second principe de la thermodynamique).
Dans ce qui suit, nous donnons une description détaillée et un développement de ces différentes équations fondamentales.